Enseignants chercheurs : le dispositif "suivi de carrière" encore perfectible
Après une phase de moratoire et d'expérimentation où certaines sections du Conseil national des universités (CNU) avaient à conseiller sur leur carrière des enseignants-chercheurs y participant de manière volontaire, le suivi de carrière se voit désormais étendu à tous les enseignants-chercheurs. L'absence d’un bilan réel et constructif de cette phase d'expérimentation, l'utilité non définie ou non assumée de ce suivi de carrière et les récentes prises de position de la Conférence des présidents d'université (CPU) et de nombreuses sections du CNU conduisent à une situation non tenable qui doit être assainie et apaisée. Les enseignants-chercheurs ne sont évidemment pas opposés au suivi de carrière. L'évaluation de leurs activités a toujours fait partie de leur quotidien. Durant leur carrière, les enseignants-chercheurs ont à justifier de leurs activités lors de l'évaluation de leur unité de recherche, lorsqu'ils postulent à des promotions ou pour l'attribution des primes comme la Prime d'encadrement doctoral et de recherche (PEDR). Les critères définissant le statut d'enseignant-chercheur publiant et non publiant sont clairs et connus pour tous les secteurs. En outre, les directions d'établissements peuvent d’ores et déjà porter une appréciation sur la qualité de leurs ressources humaines. La question se pose donc de l'objectif d'un suivi plus individualisé tel qu'il est proposé dans le décret n° 2014-997 du 2 septembre 2014. Que souhaitent tirer le ministère et les directions d'établissements de la procédure telle qu'elle est définie par ce décret ? Le SNPTES n'a cessé de dénoncer les modalités de ce suivi de carrière depuis sa mise en application (communiqué SNPTES du 5 février 2016). Pour le SNPTES, le suivi de carrière tel qu'il est proposé n'apporte rien, ni aux enseignants-chercheurs ni aux établissements. Pire, il tend à sous-estimer l'implication des enseignants-chercheurs et conduit à penser que son seul dessein est l'aspect comptable menant à la mise en place de modulations de service. Si, par le suivi de carrière, le ministère et les directions d'établissements veulent faire de la gestion de leurs ressources humaines, qu'ils l'assument. Cependant, les risques sont grands à vouloir n'imposer aux enseignants-chercheurs que des mesures coercitives sans valorisation de leur implication ni aucune perspective d'amélioration de leur carrière et de leurs conditions de travail. Face à un avenir bouché, particulièrement pour les maîtres de conférences, quel est l'accompagnement professionnel, en rapport avec ce suivi de carrière, que les établissements se targuent d'offrir ? Toutes les promotions et primes offertes aux enseignants-chercheurs font déjà l'objet d'une évaluation propre, que cela soit par le CNU et/ou par des commissions locales de pairs. Ainsi, pour le SNPTES, il est urgent de définir l'objectif de ce suivi de carrière personnalisé, qui, rappelons-le, se superpose aux évaluations collectives et lors des demandes de promotions. Les objectifs tels que décrits dans la circulaire ministérielle encadrant la mise en place du dispositif de suivi de carrière peuvent faire naître de fausses espérances, mais aussi une immense frustration au sein de la communauté des enseignants-chercheurs. Pour le SNPTES ce dispositif est perfectible, il faut donc poursuivre rapidement des concertations avec notre ministère de tutelle si l’on veut le rendre efficace et utile pour l’ensemble des parties prenantes. Le SNPTES rappelle en outre son attachement inconditionnel au rôle du CNU tel que défini par le décret n°92-70.
/Jérôme Giordano et Stéphane Pellerin Chargés de mission du SNPTES secteur enseignants-chercheurs/
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